Un grand Monsieur ! Jean Pierre Améris, cinéaste
Le premier film que mon œil a vu de lui, avait été tourné à Saint Étienne : Bruno Putzulu y jouait le personnage d'un homme qui tentait de se faire passer pour criminel afin de pouvoir être incarcéré à la prison de La Talaudière et échapper à je ne sais plus quel danger réel ou supposé. Je me souviens d'avoir trouvé remarquable la finesse avec laquelle avait été traitée cette intrigue singulière : "Les aveux de l'innocent".
C'est aux Rencontres de Marcigny, où il avait été l'un des invités d'honneur en 2003 que je découvrais vraiment son cinéma et rencontrait l'homme. D'abord par "Poids léger" qui continuait, dans les choix d'Améris de montrer des gens confrontés à un monde rude et qui se battent, bec et ongles avec les qualités qui le leur permettent, et les failles qui les desservent (le jeune boxeur joué par Nicolas Devauchelles) ; j'y découvrais aussi une rare qualité de traitement de l'image notamment dans les scènes de course à pied au lyrisme lumineux.
Mais la révélation arriva pour moi, par "C'est la vie" : il faut imaginer un film consacré à un établissement de soins palliatifs ou arrive un nouveau patient, Jacques Dutronc dont la dégaine et les silences vont donner au personnage de cet homme en fin de vie un magnifique rôle de scrogneugneu sans illusions, qui se laissera tenter par le devoir de faire bonne figure, que lui propose, tout en douceur, Sandrine Bonnaire. Là, Améris montre combien il est excellent dans la conduite de ses acteurs, et comment il sait émouvoir avec justesse dans la situation cruciale de ses personnages ; j'en ai retenu deux scènes, pour moi d'anthologie : Dutronc participant à une farandole pour fêter l'anniversaire d'un pensionnaire et un karaoké où Bonnaire osera le ridicule pour le partage d'un bon moment, même dérisoire.
En 2013, il revient à Marcigny après la bonne réception de ses "émotifs anonymes" (Poolvorde et Carré) et le succès mitigé de son "Homme qui rit", mais pour moi ce seront deux Téléfilms "Maman est folle" qui voit Isabelle Carré s'empêtrer et mettre sa famille en péril dans ses engagements auprès des immigrés kurdes de Calais, et la "Joie de vivre" d'après Zola qui m'attacheront définitivement à ce grand bonhomme du cinéma : grand, il l'est déjà par la taille et avoue en avoir souffert ; je me suis donc permis de lui dire que j'avais compris pourquoi : "C'est parce qu'il y faut beaucoup de place pour le cœur"
Vient de sortir Marie Heurtin (avec l'émotive anonyme, et folle maman, Isabelle Carré) et une excellente Ariana Rivoire dans le rôle de cette enfant sourde et aveugle .
(Le film est sous titré pour les sourds et peut être projeté en audiodescription pour les non voyants dans les salles équipées)
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